Parmi les nombreux et intéressants débats qui concernent les inscriptions dans les écoles à Bruxelles, celui du décret réglant les inscriptions dans les écoles néerlandophones, dont je vous parlais récemment, s’est invité en séance plénière du parlement bruxellois vendredi dernier.

Ce décret, voté au parlement flamand en 2010, prévoit une priorité d’inscription à hauteur d’au moins 55 % des places disponibles aux élèves qui parlent le néerlandais avec au moins un des deux parents, ces derniers devant apporter une preuve objective (diplôme, réussite d’un examen de langue…) de leur connaissance du néerlandais.

La Communauté française avait introduit un recours devant la Cour constitutionnelle à l’encontre de ce décret. Le recours a été rejeté, de sorte qu’il est aujourd’hui une réalité à Bruxelles.

Sur le fond, j’ai des difficultés avec ce décret.

Je comprends bien les préoccupations des parents, quelle que soit la (ou les) langue(s) qu’ils parlent à la maison, qui mettent leurs enfants dans une école néerlandophone et qui constatent que le néerlandais n’est pas la langue majoritairement parlée en classe ou dans la cour de récréation de ces écoles, et qui s’inquiètent donc de la qualité du néerlandais pratiqué par leurs enfants. C’est une préoccupation parfaitement légitime.

Pour autant, fallait-il adopter de cette manière une règle qui pourrait avoir pour effet (via le seuil minimal) de reporter de manière disproportionnée sur la Communauté française l’accueil des nombreux enfants qui à Bruxelles ne parlent ni le néerlandais, ni le français à la maison ?

Fallait-il adopter un décret qui présente la connaissance de la langue de l’enseignement (français ou néerlandais) comme un pré-requis, alors que j’espère que l’apprentissage de la langue de l’enseignement est un objectif, un défi que les deux communautés entendent relever à Bruxelles ?

Fallait-il enfin adopter un décret qui, combiné à d’autres, renforce quelque part le rattachement exclusif de familles bruxelloises à une Communauté, alors que c’est la liberté des bruxellois de pouvoir se rattacher à une Communauté ou l’autre, de manière non exclusive, de pouvoir panacher selon les activités (école, crèche, scouts, académies, bibliothèques, activités culturelles etc.) et même de pouvoir passer de l’une à l’autre ?

Au-delà de cela, je constate tous les jours que les défis de l’enseignement à Bruxelles, qu’il relève de la Communauté française ou de la Communauté flamande sont les mêmes. Il faut notamment :

  •  augmenter la capacité d’accueil des enfants en raison de l’essor démographique ;
  • mettre le paquet sur l’apprentissage de la langue de l’enseignement (fr ou nl) ;
  • mettre le paquet sur l’apprentissage de la « 2e » langue (soit le fr ou le nl).

Ces défis sont communs aux deux Communautés. Et au lieu, de se concerter pour s’y atteler conjointement, je regrette de trop souvent devoir constater des attitudes concurrentielles, voire conflictuelles.

Dans ce dossier, une Communauté a adopté des mesures unilatérales et non concertées. L’autre a introduit un recours en annulation du décret devant la Cour constitutionnelle.

Dans un autre dossier, dont je vous parlais aussi dernièrement, les efforts nécessaires développés par la Région de Bruxelles-Capitale pour augmenter les places dans les crèches ou dans les écoles en raison de l’essor démographique… sont attaqués par la Communauté flamande devant la Cour constitutionnelle (Communauté flamande qui, dans le même temps, introduit des dossiers à la Région pour profiter de ces plans qu’elle conteste par ailleurs… on croit rêver !)

Plutôt que de se tirer dans les pattes, il y a pas moyen de s’asseoir autour de la même table et de s’atteler aux vrais problèmes de l’enseignement bruxellois, et aux préoccupations des parents, qui sont loin d’être communautaires ?